Thibaut Démare

Une dystopie chez les utopiques

Problemos est un film satirique plutôt sympathique. La réalisation n’est pas super originale, mais le scénario est quant à lui très bon et dresse un parallèle intéressant avec notre propre société. De plus, le film n’hésite pas à casser un peu tout le monde grâce à quelques dialogues bien trouvés. Sans vouloir développer une critique particulièrement longue, j’aimerais attirer par la suite votre attention sur l’un des points du film qui, selon moi, illustre assez bien ce côté satirique.

Attention cependant, la suite de cette critique contient des spoilers.

Lorsque les personnages finissent par découvrir qu’ils sont les seuls survivant, la petite communauté s’organise. Le film décrit progressivement la formation d’une société qui dérive rapidement vers un simulacre de notre propre société. En effet, on y voit une communauté en trois strates :

  • le cœur de la communauté avec les gens moyennement riches.
  • le pauvre (le SDF).
  • et le riche (càd le mec qui a construit sa propre maison avec eau chaude et électricité). Cette société fictive fonctionne comme la notre et a les mêmes travers. La communauté n’hésite pas à exclure le SDF, elle ne cherche pas à l’aider, elle le trouve sale et ne veut pas qu’il s’intègre. Le mec qui a construit la maison c’est l’équivalent du 1% de riches qui détiennent les 99% (d’ailleurs, il y a un homme riche sur environ 100 survivants). Il n’hésite pas à exploiter le reste de la communauté en échange d’argent (ici de l’eau chaude). Et la communauté se plaint de ne pas pouvoir accéder gratuitement à cette richesse. C’est là que la communauté se montre hypocrite. Elle réclame le confort du riche sous des prétextes d’égalité, alors que dans le même temps, elle exclut le SDF du confort que la communauté pourrait lui offrir par soucis d’égalité.

Ceci était un exemple dans le film mais en réalité, la communauté, qui au départ se veut écolo, ouverte d’esprit et égalitaire, va virer en communauté discriminante et même finir en dictature colonialiste bien loin des idéaux initiaux. On pourra toutefois remarquer que c’est bien le personnage d’Éric Judor qui est le leader du groupe à la fin. Son personnage n’était que visiteur au départ, et il ne fait pas partie des “utopiques”. D’une certaine manière, son personnage représente à lui seul notre propre société. Et le fait que ce soit lui qui devienne le chef, montre que notre société finit par corrompre les idéaux utopiques.

Un film satirique dans un cadre post-apo n’est pas une idée originale mais force est de constater que le sujet est ici bien maîtrisé. Les auteurs ont réussi à proposer un film intelligent et drôle qui sans être un chef d’œuvre reste bien meilleur que les nombreuses comédies françaises sans relief qu’on peut voir chaque année.